La rivière incontournable de Panama. 3 jours sur le Rio Chagres. Caïmans, paresseux, toucans….
#198 ✍️ 20 mars, il y a des lieux comme ça, où l’on se sent bien. Des lieux où le temps passe sans que l’on s’en aperçoive. Portobelo fait partie de ces escales qui nous ont fait vibrer. S’en vient, non loin, une nouvelle destination, Shelter bay à Colon. Moins exotique, plus formelle. C’est là que nous devons nous rendre pour faire mesurer Black Lion avant la traversée du fameux canal. Préliminaire d’un rituel bien rodé. Contrairement aux rumeurs exhortant d’engager un agent pour les laborieuses démarches, celui-ci n’est pas obligatoire et les formalités, loin d’être insurmontables !
A l’époque, encore à notre passage en 2016, nous pouvions nous rendre au Nautico Yacht Club. Pratique, en plein centre de Colon, nous avions accès à un ponton pour notre annexe et toutes les commodités pour trois fois rien. Mais cette époque est révolue. Abus de position de la concurrence ? Pratiques anticoncurrentielles ? Enjeux économiques trop tentant ? Les hypothèses sont nombreuses, mais les faits sont là : Shelter Bay a maintenant le monopole ! Et qui dit monopole, dit tarifs en conséquence ! Ce procédé nous horripile ! C’est pourquoi, nous allons tout faire pour détourner cette marina dite obligée.
En attendant les mensurations de notre Lion, un refuge nous appelle… Le Rio Chagres…Contribuant à alimenter le lac Gatùn, ce rio joue un rôle important dans le système du canal de Panama. Son entrée est délicate, mais des indications sûres nous permettent d’y accéder sans danger. On réduit la vitesse pour entrer en douceur. A notre bâbord, le fort Lorenzo, vieux de 400 ans. Erigé par les Espagnols au cours de la moitié du XVIIe siècle pour protéger la région des attaques de pirates et de corsaires. Et la nature, sauvage, dense, luxueuse. Dire que juste derrière, se trouve un des trafics maritime et économique le plus important de la planète !
Notre premier repérage en kayak est plus que prometteur ! Aucune nuisance humaine ne vient troubler la quiétude de cette forêt tropicale. Tous nos sens sont à l’affût, on s’imprègne de la résonance de chaque être. Le chant des oiseaux, le froissement des feuilles sur lesquels se faufilent les lézards et les crabes, les jacassements des singes, le babillage des perruches. Le paresseux, lui, reste discret. Paisible, dans la canopée, il se laisse observer. Les plus impressionnants sont les hurlements des singes du genre portant le même nom !
Je me sens bien, comme ma moitié, complètement imprégnée des lieux. Une parenthèse hors du temps où nous nous sentons en osmose ! La brume surplombe le Rio. Rien ne bouge. Rien, sauf un crocodile ! Il godille, sans nul doute, confiant. Son attitude flegmatique est captivante. Il incarne parfaitement la tranquillité de cet endroit préservé, où la faune règne en maitre. Un serpent suit sa trace pendant que les toucans merveilleusement colorés traversent d’une rive à l’autre.
En suivant le cours d’eau vers l’intérieur des terres, nous arrivons au lac Gatun. Là où tous les navires transitent avant de rejoindre, soit le Pacifique, soit l’Atlantique. Pour combien de temps encore, si proche de cette frénésie économique, ce paradis écologique sera épargné ? Les braconniers sont déjà sur le coup ! Nous les avons entendus, de nuit, déforester. Où iront alors ces milliers d’insectes, d’animaux ? Qu’adviendra-t-il de cette faune abondante ? Pourvu que nos enfants puissent encore voir toute cette beauté. On aimerait arriver à nous fondre dans la masse, comme toutes ces créatures imitant la végétation avec génie, de jour comme de nuit.
Sur l’eau marbrée, nous sommes portés par une espèce de curiosité de tous les instants. Cette graine nous intrigue ! Longue, dure, poilue… Ah non ! Pas d’idée tordue ! Je parle de la graine du balsa ! Le rivage en est envahi, jusqu’au fort Lorenzo. Si les pierres pouvaient parler, que nous diraient elles ? L’histoire nous transporte à l’aire des canons, tant qu’à ce croati et sa longue truffe, avec un peu d’imagination, il nous fait atterrir à l’époque des branchiosaurus…
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